Les prisons aux arrêts ?

SAINT-MARTIN-DE-RÉ, ROCHEFORT ET SAINTES. La garde des Sceaux pourrait fermer le célèbre pénitencier ainsi que quatre autres établissements

Sur l'île de Ré, la citadelle de Saint-Martin sert de prison depuis 1685. Mais son fonctionnement est trop coûteux. (photo dominique jullian)

S'il est certain que les Dreyfus, Seznec et autres Papillon n'y ont sans doute pas passé les meilleures années de leur vie, à force d'erreurs judiciaires ou de mises à l'ombre historiques, le pénitencier de l'île de Ré est devenu l'un des plus célèbres du pays. Mais ses portes pourraient bientôt définitivement se refermer si les intentions que l'on prête à Michèle Alliot-Marie se révèlent exactes.

Ainsi, alors que la garde des Sceaux dévoilera - à la fin de cette année - une nouvelle réforme du paysage carcéral, cinq établissements de la région seraient menacés de fermeture pour cause de vétusté ou d'économies d'échelle. Selon nos informations, les maisons d'arrêt de Rochefort, Saintes, Niort (Deux-Sèvres) et Fontenay-le-Comte (Vendée) feraient aussi partie de la charrette.

Confidentiel

Pourtant, si le directeur de Saint-Martin reconnaît lui-même, à demi-mot, que la configuration de son vaste établissement est la source d'un déficit financier chronique, il assure ne pas croire à une telle décision. Côté surveillants, les syndicats, alertés, sont en revanche persuadés que la messe est dite.

« L'idée était dans l'air depuis des années », regrette Christian Le Floch, délégué de l'Ufap (Union fédérale autonome pénitentiaire). Sans faire de cette centrale insulaire le paradis des mitards sur terre, la plupart de ses collègues redoutent d'être bientôt avalés par une nouvelle prison regroupant à la fois des détenus purgeant de longues peines et les centaines de présumés innocents en attente de jugement à l'ombre des maisons d'arrêt surpeuplées du département.

« Ici, les mecs sont plutôt calmes, parce qu'on les connaît, et qu'ils nous connaissent. Ça évite bien des tensions. Avec 380 détenus, c'est d'autant plus une prison à taille humaine que des millions d'euros viennent d'être investis pour la rénover. »

Car la fermeture de ces cinq établissements aurait forcément comme préalable la construction d'une immense prison de plus de 1 200 places, sans doute à proximité de l'agglomération rochelaise. « Alors, bien sûr, dans les nouveaux centres comme ceux de Poitiers ou de Mont-de-Marsan, on trouve des salles de sport hyper modernes, mais ça ne fait pas tout, loin de là, surtout lorsque l'on compile, sur le même site, une maison d'arrêt pour hommes, une autre pour femmes, un centre de détention pour jeunes et une centrale comme Saint-Martin. »

Le camp américain ?

Déjà évoquée par le passé, l'hypothèse de l'ancien camp américain de Croix-Chapeau refait pourtant surface. « Une rumeur grossière », selon le député UMP Jean-Louis Léonard, qui rappelle que ces 50 hectares ont été, depuis, reconvertis en zone d'activités abritant une trentaine d'entreprises et autant de particuliers.

Un doute partagé par l'actuel propriétaire des lieux, très circonspect à l'idée de devoir démonter les 32 000 mètres carrés de toiture solaire qu'il installera bientôt, avec la bénédiction du Conseil général.

Sans démentir ces projets, hier, la Chancellerie se contentait d'admettre qu'une liste d'établissements vétustes serait déposée d'ici la fin du mois sur le bureau de Michèle Alliot-Marie par les cadres de l'administration pénitentiaire. « Aucune décision ni aucune orientation ne sont prises, mais elle annoncera, en effet, des fermetures dans les prochaines semaines. Il y aura moins de prisons, mais elles seront plus modernes. »

Les premières fermetures auront probablement lieu dès 2012, tandis que celles concernant la Charente-Maritime pourraient intervenir à l'horizon 2016. Lors de sa visite l'an dernier à Saint-Martin, Rachida Dati avait promis au personnel que jamais le pénitencier ne disparaîtrait.

Sources : Sud Ouest du 9 octobre 2009